Fiche HDA-Marcel Duchamp-Fontaine

Publié le par Mme Pigeon

L'OEUVRE DE MARCEL DUCHAMP

L'oeuvre de Marcel Duchamp bouleverse radicalement l'art du 20e siècle. Avec l’invention, dans les années dix, du ready-made une pièce que l'artiste trouve « already-made», c’est à dire déjà toute faite et qu'il sélectionne pour sa neutralité esthétique, il ouvre la voie aux démarches avant gardistes les plus extrémistes.

Tous les mouvements qui utilisent des objets de la vie courante, pour surprendre comme le Surréalisme, le Pop art et le Nouveau réalisme, lui sont redevables d'avoir transgressé les coutumes académiques. Après Duchamp, le carcan des médiums traditionnellement employés éclate et il devient possible d'utiliser n'importe quel objet, avec ou sans transformation.

Le XXème siècle lui doit donc l'initiative du renouvellement des matériaux utilisés dans l’art, mais aussi un goût pour des questions complexes d'esthétique qui aboutiront dans les années 70 à l'Art conceptuel. Il s’inscrit dans la lignée des artistes « intellectuels », comme Léonard de Vinci et Joseph Kosuth.

BIOGRAPHIE DE L’ARTISTE

Il est né en 1887 et mort en 1968.

Marcel Duchamp est le troisième d'une famille de six enfants, dont quatre sont des artistes reconnus : les peintres Jacques Villon et Suzanne Duchamp, le sculpteur Raymond Duchamp-Villon et lui même, le plus célèbre. Ce sont d'ailleurs ses frères qui l'initient à l'art.

C'est auprès de ses frères qu'il fait son véritable apprentissage de la peinture et de leurs amis, principalement des artistes d'inspiration cubiste comme Fernand Léger ou Robert Delaunay.

Toutefois, très vite sa peinture s'éloigne de la problématique spatiale des cubistes et s'attache à la décomposition du mouvement, ce qui le rapproche des Futuristes italiens. L'une de ces toiles, Le Nu descendant l'escalier, le fait connaître à la grande exposition américaine de l'Armory Show, en 1913.

À partir de 1915, installé à New York, il partage son temps entre les EtatsUnis et la France, diffusant les avant-gardes parisiennes, notamment les sculptures de son ami Constantin Brancusi, auprès du public.

Il devient célèbre après la Seconde Guerre mondiale. Dans les années 50, une nouvelle génération d'artistes américains qui se qualifient de néo-dadaïstes, tels Jasper Johns et Robert Rauschenberg, le reconnaît comme un précurseur.

La réédition en 1964 de ses premiers objets ready-mades parachève cette célébrité en diffusant son oeuvre dans le monde entier.

MARCEL DUCHAMP, DISCOURS AU MUSÉE D'ART MODERNE DE NEW YORK, 1961

Dans le cadre de l'exposition Art of assemblage reproduit dans Duchamp du signe, pp. 191-192,

Flammarion, 1994 © Succession Marcel

Duchamp, Adagp, Paris 2007.

A propos des « Ready-mades »

« En 1913 j'eus l'heureuse idée de fixer une roue de bicyclette sur un tabouret de cuisine et

de la regarder tourner. Quelques mois plus tard j'ai acheté une reproduction bon marché d'un paysage de soir d'hiver, que j'appelai « Pharmacie » après y avoir ajouté deux petites touches, l'une rouge

et l'autre jaune, sur l’horizon. A New York en 1915 j'achetai dans une quincaillerie une pelle à neige sur laquelle j’écrivis « En prévision du bras cassé » (In advance of the broken arm). C'est vers cette époque que le mot « readymade» me vint à l'esprit pour désigner cette forme de manifestation.

Il est un point que je veux établir très clairement, c'est que le choix de ces readymades ne me fut jamais dicté par quelque délectation esthétique. Ce choix était fondé sur une réaction d'indifférence visuelle, assortie au même moment à une absence totale de bon ou de mauvais goût… en fait une anesthésie complète.

Une caractéristique importante : la courte phrase qu'à l'occasion j'inscrivais sur le readymade.

Cette phrase, au lieu de décrire l'objet comme l'aurait fait un titre, était destinée à emporter l'esprit du spectateur vers d'autres régions plus verbales. Quelques fois j'ajoutais un détail graphique de présentation : j'appelais cela pour satisfaire mon penchant pour les allitérations, « un readymade

aidé » (readymade aided).

Une autre fois, voulant souligner l'antinomie fondamentale qui existe entre l'art et les readymades,

j'imaginais un « readymade réciproque » (reciprocal readymade): se servir d'un Rembrandt comme table à repasser !

Très tôt je me rendis compte du danger qu'il pouvait y avoir à resservir sans discrimination cette forme d'expression et je décidai de limiter la production des readymadesà un petit nombre chaque année. Je m'avisai à cette époque que, pour le spectateur plus encore que pour l'artiste, l'art est une drogue à accoutumance et je voulais protéger mes readymades contre une contamination de ce genre.

Un autre aspect du readymade est qu'il n'a rien d'unique… La réplique d'un readymade transmet le même message ; en fait presque tous les readymades existant aujourd'hui ne sont pas des originaux au sens reçu du terme. Une dernière remarque pour conclure ce discours d'égomaniaque :Comme les tubes de peintures utilisés par l'artiste sont des produits manufacturés et tout faits, nous devons conclure que toutes les toiles du monde sont des readymades aidés et des travaux d’assemblage.»

Marcel Duchamp, Fontaine, 1917, Ready Made : urinoir en porcelaine sanitaire, 61 x 48 x 36 cm, perdu.

L’original avait été réalisé à New York en 1917. Il a été perdu. Il existe deux répliques exécutées d’après la photographie d’Alfred Stieglitz sous la direction de Marcel Duchamp en 1964. L’une d’elles est au Centre Georges Pompidou à Paris et l’autre à la Galerie Schwarz à Milan.

Marcel Duchamp réalise cette œuvre pour tester l’ouverture d’esprit de la Society of Independant Artists de New York (dont il est membre). Car cette association affirme que leur exposition (contrairement à celles des Salons officiels parisiens) est ouverte à toutes les œuvres : sans prix, ni jury. C’est sous le pseudonyme de Richard Mutt qu’il présente son urinoir au comité d’accrochage. L’objet suscite polémique et finit par être relégué hors des espaces d’exposition.

Avec cette oeuvre, Marcel Duchamp crée le Ready Made.

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